Le jour où je viendrai… quand je prendrai ce train
Qui tarde sur le quai, je prendrai en otage
Les livres que je veux te donner en partage
Le grand miroir doré, un buste en plâtre peint
Je laisserai ici sur le bord du trottoir
Les chemises, les jeans et les foulards de soie
Mes chaussures à talons, mes baskets écornés
Mon ciré de Bretagne et mon manteau chinois
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J’oublierai les bougeoirs, les couverts démodés
L’odeur de ma maison, le parfum du jasmin
Les dentelles jaunies, les vases ébréchés
Qui ne recevront plus les fleurs de mon jardin
Je bouclerai mon sac et je mettrai le chat
Dans le coffre en osier ou dans un grand carton
Bordé de couvertures, enveloppé de draps
Il pourra s’endormir dans son léger ronron
Check-list
Je rangerai aussi les cahiers de poèmes
Et les lettres d’amour enrubannées par deux
Qui disent je t’attends, qui me disent je t’aime
Avec ces mots légers qui masquent des aveux
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En fermant sans regrets ma vieille malle en cuir
Sur les anciens chagrins, je pourrais effacer
Les images, les rêves, les mauvais souvenirs
Le peu que j’ai gardé des fragrances passées
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Je laisserai le vent soulever la poussière
Sur le seuil de la porte et sous les volets clos
Je claquerai sans bruit la grille et la barrière
Je jetterai les clefs je tournerai le dos
Dis-moi que tu me veux, dis-moi que tu m’espères
Et je serai sans honte en arrivant vers toi
Je ne porterai plus que la robe légère
Que tu peux soulever avec le bout des doigts
Rien d’autre ne viendra alourdir mon bagage
Le jour où tu seras au bout de mon voyage.